l’acte chirurgical.
NDLR : Cette tribune répond à celle
d’Henri Carlioz parue dans le numéro 2
de la Gazette du GEOP. “Le temps plein
hospitalier entre l’enthousiasme et le
désarroi.”
Henri Carlioz appartient à la première
génération des PUPH temps plein des
CHU. Repassant dans son service, il
constate une certaine morosité des
équipes chirurgicales et nous propose
d’y remédier par une transformation du
statut des PU PH.
La critique de ce statut est classique :
nous ne pouvons remplir une triple
fonction de soins, d’enseignement et de
recherche ! Il considère que si notre for-
mation aux soins est de qualité, par
contre notre formation à l’enseignement
est « nulle », la formation à la recherche
est « inutile » pour ceux qui ne
voudraient pas en faire et notre prépara-
tion aux fonctions de chefs de service «
inexistante ». Ainsi, dans un grand élan
de « repentance », il propose de mod-
ifier ce statut, en grande partie
responsable de cette morosité ! !
Voilà comment, à partir d’un constat
commun à tous les services de chirurgie
des CHU, on désigne le coupable idéal
de cette morosité : le PUPH qui par son
statut « privilégié » perturbe le bon
fonctionnement des CHU ! ! Dès lors, il
nous propose de devenir des praticiens
hospitaliers temps plein ou mi-temps,
qui au cours de l’évolution de leur car-
rière choisiraient d’ajouter une valence
universitaire, de recherche, ou adminis-
trative. D’ailleurs, pourquoi pas les trois
en même temps ?
Si la morosité s’est effectivement
emparée des équipes hospitalières, cela
doit nous amener à nous poser un cer-
tain nombre de questions : quelles sont
les causes de cette morosité ? La modi-
fication du statut des PUPH est-elle la
bonne réponse ou y a-t-il d’autres
réponses possibles ?
Pourquoi sommes-nous nombreux à
partager cette morosité ?
Parce que les effets pervers de la poli-
tique de santé menée depuis 10 à 15
ans vis-à-vis des CHU commencent à
apparaître :
La politique de restrictions budgétaires,
conduite par le budget global à taux
presque constant, nous amène à faire
des choix médicaux. Est-ce acceptable
de « contractualiser » le nombre de
malades à opérer par an ? Est-il juste
pour nos malades de ne pas pouvoir
bénéficier des derniers progrès tech-
nologiques ? Est-il normal de choisir le
produit le moins cher, s’il ne correspond
pas aux attentes d’une bonne qualité de
soins ?
La priorité donnée à la prise en charge
des urgences, seule obligation légale,
est logique mais poussée trop loin,
devient « contre-productive » ! ! La peur
d’un dérapage médiatique conduit l’ad-
ministration à privilégier l’accueil, « la
façade » des urgences au détriment des
arrière-boutiques que sont les services,
pardon, les “unités” où pourtant une
grande partie de la prise en charge de
l’urgence est réalisée.
Face à cette évolution, la diminution du
nombre d’internes se poursuit. De nou-
velles dispositions tels le repos de sécu-
rité, la RTT, vont faire que nos jeunes
collègues, peu nombreux, très souvent
de garde, et poursuivis s’ils s’occupent
d’un patient un lendemain de garde et
qu’un problème survient, vont avoir de
grandes difficultés à se former à
l’ensemble de notre spécialité. Ils auront
d’ailleurs beaucoup de mal à exprimer
leur mécontentement à leur chef de ser-
vice sans prendre rendez-vous avec lui,
trop occupé qu’il sera par des réunions
administratives. Est-ce bien avec ce
cadre que nous allons attirer et former
nos jeunes collègues ?
Oui, Henri Carlioz a fait un bon diag-
nostic, mais les motifs de “ morosité “
sont nombreux et le désarroi touche
tous les praticiens du CHU sans distinc-
tion de catégorie ou de grade. Alors, le
changement du statut des PUPH est-il la
réponse nécessaire ?
Nous en doutons et nous pensons, au
contraire que seul ce statut limite la
dégradation des CHU et que nous devri-
ons être plus nombreux.
Les soins.
De par leur statut, les uni-
versitaires ne devraient être que des
hospitaliers mi-temps ! ! N’est-ce pas là
une réforme souhaitée par H. Carlioz ?
Simplement, appliquons notre statut et
nous aurons le temps de nous impliquer
dans nos autres missions. Dès lors il va
manquer de « bras » dans le CHU. Eh
bien, nommons d’autres PUPH ! !
La recherche
ne peut être faite par les
chirurgiens ? Oui si l’on considère que
nous ne serons jamais au niveau des
fondamentalistes. Mais la recherche
clinique n’est pas la recherche fonda-
mentale. Participer à la vie d’un labora-
toire de recherche, c’est apporter aux
chercheurs des questions qu’ils ne peu-
vent connaître sans nous ! ! C’est aussi
apprendre à leur contact la méthodolo-
gie nécessaire à la réalisation de travaux
prospectifs. Est-ce trop demander ?
L’enseignement.
Ne plus enseigner
pendant 3, 5 ou 10 ans parce que l’on a
choisi de délaisser la valence d’en-
seignement, c’est ne plus transmettre le
savoir que nous apprenons au contact
du malade.
Faire le choix de délaisser l’une ou
l’autre de nos activités, c’est s’amputer,
se restreindre et finalement s’appauvrir
intellectuellement. Et puis, il y a ce
souhait d’Henri Carlioz à être évalué.
Mais nous sommes déjà évalués !!
Evalués par nos instances hospitalières,
puisque le titre de chef de service est
remis en jeu tous les 4 ans. Il faut à cette
occasion proposer un projet de service
que personne ne lira et dont personne
ne vérifiera s’il a été mis en application.
Evalués aussi par les instances de la
recherche puisque toutes les unités de
recherche ont une évaluation tous les 4
à 8 ans ! ! ,
Seule,
effectivement
l’Education
nationale n’évalue pas ses professeurs.
Mais, cela ne saurait tarder puisque
nous venons de leur fournir un rapport
quadriennal sur notre activité. Qui le
lira ? Quelles en seront les con-
séquences ? De plus dans certaines
Facultés les enseignants sont notés par
les étudiants. N’est-ce pas une évalua-
tion ?
Non, nous pensons qu’appartenir au
ministère de l’Education Nationale est
une chance car c’est le seul contre-pou-
voir dans un système hospitalier qui
n’est intéressé ni par l’enseignement, ni
par la recherche. Ainsi, il ne nous sem-
ble pas que la modification du statut des
PUPH puisse engendrer bonheur et
prospérité dans les hôpitaux. C’est faire
trop d’honneur aux PUPH que de faire
croire que le malaise général leur est dû.
Les plus jeunes n’ont pas connu
l’époque du temps partiel dans les hôpi-
taux publics. Si les hôpitaux publics qui
étaient peu ou prou réservés « aux plus
démunis » de notre société sont
devenus les CHU, Iieu encore d’excel-
lence de la pratique médicale, c’est
grâce à la loi Debré. Cette loi a établi le
plein temps hospitalier en créant le
grade particulier de Professeurs des
Universités qui offre un statut, une car-
rière, des émoluments attractifs pour
éviter la fuite des meilleurs vers le privé.
Le statut de PH avait été créé pour cer-
taines activités hospitalières nécessitant
une expertise dans un domaine spéci-
fique. Ce statut a été dévoyé car les PH
dans les CHU font pour beaucoup d’en-
tre eux, de l’enseignement et de la
recherche. Au risque d’être provocateur,
c’est ce statut qu’il faut revoir en aug-
mentant le nombre de Professeurs des
Universités, permettant aux PH qui rem-
plissent cette triple mission d’accéder à
ce grade. Quand nous serons assez
nombreux, alors l’un d’entre nous,
choisi par ses pairs, pourra faire du «
management » à condition qu’il ne
serve pas de caution aux décisions
administratives mais qu’il exerce une
vraie responsabilité de gestionnaire
médical.
Nous remercions Henri Carlioz d’avoir
soulevé ce débat même si nous ne
sommes pas d’accord avec lui sur les
moyens de voir la vie en rose ! !
7
Carlioz m’ a tué !
«Tous PH à Valence»
J. Ph. Cahuzac (Toulouse), G. Bollini (Marseille)
Fig 1 : Jean Philippe Cahuzac
Fig 2. Gérard Bollini
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