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Défier Hollywood : la diplomatie culturelle et le cinéma à l’ère Brejnev
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central supervise le comité d’État pour la cinématographie du
Conseil des
ministres (ci-après le Goskino), créé en 1963, ainsi que l’Union des ciné-
matographes, une pseudo-association de la société civile créée en 1957.
Le Goskino et l’Union supervisent à leur tour les 39 studios soviétiques,
au premier chef desquels Mosfilm. Le ministère de la Culture d’urss et le
ministère des Affaires étrangères (mid) sont également soumis au départe-
ment Culture. En aval, l’industrie dispose de moyens significatifs, toujours
en apparence : la distribution des films est confiée aux représentations de
Sovexportfilm, une organisation créée en 1945, et qui répond aux ordres
de Goskino. Dans les pays où les représentations n’existent alors pas ou
pour aider la distribution, les Soviétiques font appel à
des organisations
comme Pegasusfilms à Berlin-Ouest.
Les moyens du Parti sont mis en place dans le cadre du plan annuel
et quinquennal et ne nécessitent pas, en principe, d’interventions parti-
culières. Il en va ainsi de la participation au festival de Cannes, prévue
par un accord négocié chaque année
15
. Pour continuer de remplir le pre-
mier objectif dans un monde en évolution, le Parti peut cependant tenter
d’infléchir les objectifs ou les préciser par le biais de « corrections de par-
cours ». Ainsi, le 19 juillet 1966, est promulguée la résolution « Sur l’amé-
lioration de la diffusion des films soviétiques à l’étranger », qui met l’accent
sur plusieurs axes à améliorer, qui vont de la constitution de réseaux amis
au contrôle de la qualité
des copies vendues
16
.
Pour remplir le deuxième objectif, les
moyens sont de deux ordres
(si l’on excepte la contre-propagande dans la presse soviétique), dont le
premier est celui de la « riposte symétrique ». Ainsi, pour défier le cinéma
de guerre américain, les Soviétiques produisent l’épopée
Libération, une
saga en cinq films dont la mission est non seulement d’« éduquer les
Soviétiques, mais aussi montrer aux hommes du monde entier la grandeur de
l’exploit accompli par l’urss dans la Grande Guerre patriotique et arracher
le masque de l’objectivité de nombreuses imitations du cinéma bourgeois
qui cherchent à diminuer le rôle et la signification de notre victoire sur
le fascisme »
17
. L’initiative de
Libération appartiendrait non au Parti, mais
au réalisateur Iouri Ozerov, agacé après le visionnage du
Jour le plus long
18
.
À côté des films de fiction sont réalisés
aussi plusieurs documentaires,
par des auteurs de renom. Notamment en 1965, pour les vingt ans de
la Victoire :
Grande Guerre patriotique (Roman Karmen),
Fascisme ordinaire
(Mikhaïl Romm) et
Devant le tribunal de l’histoire (Fridrich Ermler).
Les moyens mis en œuvre relèvent aussi de la « riposte asymétrique » :
l’urss use et abuse
de pressions et de chantages, tactiques anciennes
19
.
15. 5/62/91/54-55. Note du Goskino (Alexeï Romanov, président), 9 avril 1970 (p. 793).
16. 5/59/64/50-52. Note du Goskino (Romanov), 9 juin 1967 (p. 358-365).
17. 5/62/90/134-139. Note du secrétaire du Comité central ukrainien F. Ovtcharenko, 7 octobre
1970 (p. 851).
18. Fedor Razzakov,
op . cit ., p. 522.
19.
Pauline Gallinari, « L’urss au festival de Cannes 1946-1958 : un enjeu des relations franco-
soviétiques à l’heure de la guerre froide »,
1895 . Revue de l’
afrhc
, n
o
51, p. 23-43.
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Andreï Kozovoï
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Ainsi, il est envisagé de rompre les contacts avec les personnes qui ont
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