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Défier Hollywood : la diplomatie culturelle et le cinéma à l’ère Brejnev
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L’urss rencontre également un succès mitigé dans sa stratégie de pres-
sions et de chantages. Ainsi, apprenant que le XIX
e
festival de Cannes
prévoit de projeter le premier jour, le 5 mai 1966,
Le Docteur Jivago (1965,
David Lean),
le film
aux cinq Oscars adapté de l’œuvre éponyme de
Boris Pasternak, interdite en urss, les Soviétiques font savoir qu’ils ne par-
ticiperont pas au festival. Résultat :
Le Docteur Jivago est finalement projeté
hors compétition un autre jour
40
. Mais Cannes tient sa revanche l’année
suivante, lorsque le film de Robert Hossein
J’ai tué Raspoutine, qui a tout
pour déplaire aux Soviétiques, est projeté à l’ouverture, le 27 avril 1967,
tandis que
Guerre et paix est montré hors compétition le 4 mai
41
.
Au vu de ces résultats plus que ternes pour la diplomatie culturelle
soviétique, on serait tenté de répondre par la négative à la question posée
dans l’introduction. Pourtant, les choses sont bien plus complexes, comme
le montre le cas des coproductions.
DU DÉFI À LA COLLABORATION
Les coproductions apparaissent avec le développement de l’industrie
cinématographique soviétique, bien avant la guerre. Mais le boom des
coproductions a lieu avec le développement d’une véritable diplomatie
culturelle au cinéma. Depuis 1950, on en compte plus de 40, surtout au
cours de notre période
42
. On collabore naturellement avec des pays avec
lesquels on a de bonnes relations : sous Khrouchtchev, avec les Français ;
sous Brejnev, avec les Italiens ; avec la détente, ce seront les Américains au
début des années 1970
43
. En 1968, pour gérer un domaine en expansion,
est créé Sovinfilm, institution spécialement chargée de l’épineuse question
des droits d’auteurs.
L’intérêt des coproductions est évident pour l’urss. Elles contribuent à
améliorer l’image du régime sur la scène internationale et font de Moscou
un partenaire fiable dans le domaine des contacts commerciaux. La pré-
sence de stars internationales dans ces films joue un effet psychologique
de tout premier plan, en conférant à l’urss une aura de « glamour » indé-
niable. Elles sont aussi très intéressantes du point de vue financier, l’urss
jouant le rôle de prestataire de services en faisant payer le prix fort à ses
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