Ahmed Larbi, Patrick Omoumi, Frédéric Lecouvet, Jacques Malghem, Bruno Vande Berg
Département d’imagerie médicale, Clin. Univ. St-Luc, UCL, Bruxelles.
OR
THO
INTRODUCTION
Les lésions calcifiées des extrémités sont fréquemment
observées sur des radiographies standard. On les retrouve
dans tous les compartiments anatomiques de la main et elles
peuvent prendre l’aspect de véritables «pseudotumeurs» (1).
Leur découverte est volontiers fortuite ou se fait à l’occasion
d’une tuméfaction ou d’une douleur. Les principales étio-
logies de ces lésions bénignes sont la goutte tophacée chro-
nique, la calcinose et la chondrocalcinose pseudotumorale.
LA GOUTTE TOPHACÉE CHRONIQUE
La goutte tophacée chronique correspond à des dépôts de
cristaux d’urate de sodium à la surface du cartilage, dans la
membrane synoviale, les structures capsulo-ligamentaires
et les parties molles sous-cutanées (2). La distribution est
souvent polyarticulaire et asymétrique. Les tophus sous-
cutanés se traduisent par la présence de masses plus ou
moins denses. Cependant, la densité en TDM ne dépasse
pas 300 unités Hounsfield (en moyenne 170UH). Les
érosions osseuses, bien limitées, sont secondaires à ces
tophus goutteux. Elles sont souvent entourées d’un liseré
d’ostéosclérose (Figure 1).
Ces tophus peuvent être en situation intra-osseuse. Ils se
traduisent alors par la présence d’une lacune osseuse bien
limitée, parfois entourée d’un liseré d’ostéosclérose.
Il n’existe pas de raréfaction osseuse et les interlignes arti-
culaires sont pendant longtemps conservés.
Figure 1: Radiographies standard
d’un patient de 65 ans présentant
un syndrome du canal carpien.
Notez les tophus goutteux
représentés sous la forme de
formations pseudotumorales
d’aspect dense au pourtour
des interphalangiennes (têtes
de flèche) avec destruction de
l’interphalangienne proximale.
Figure 2: Patiente de 43 ans,
sans antécédent particulier,
présentant une tuméfaction
indolore du 1
er
rayon.
La radiographie standard
montre une pseudotumeur
caractérisée par la présence
de dépôts calciques amorphes
péri-articulaires présentant
des contours plurilobulés
(têtes de flèche). Le diagnostic
de calcinose pseudotumorale
a été confirmé par l’examen
anatomo-pathologique de la
pièce opératoire.
Les tumeurs et pseudotumeurs des extrémités sont fréquemment observées sur
des radiographies standard. Leur découverte est volontiers fortuite ou se fait à l’occasion
d’une fracture pathologique. L’enchondrome est de loin la lésion la plus fréquente.
Après avoir passé en revue les principales lésions à matrice chondroïde de la main et des
doigts dans un précédent article («Tumeurs et pseudotumeurs de la main: tumeurs cartila-
gineuses»), les auteurs abordent dans cet article les principaux diagnostics différentiels
que sont les lésions calcifiées de la main.
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Figure 3: Patient de 62 ans présentant une tuméfaction indolore du
2
e
rayon, évoluant depuis plusieurs années.
A: La radiographie standard montre une lésion pseudotumorale sous
la forme d’une masse solitaire, calcifiée et mal limitée (tête flèche).
Cette lésion siège au niveau de l’articulation métacarpo-phalangienne
et semble éroder la tête du métacarpe.
B: TDM avec reconstruction sagittale permettant de mieux visualiser
la pseudotumeur érodant l’os cortical de la tête du métacarpien
(tête de flèche).
L’examen anatomopathologique de la pièce opératoire a conclu à une
chondrocalcinose pseudotumorale.
A
B
Figure 5: Patiente de 56 ans, aux antécédents de tendinopathie calcifiante du supra spinatus. Douleurs intenses du poignet sur son versant ulnaire,
d’horaire inflammatoire et d’apparition rapide.
A: Radiographie standard à J0 montrant une calcification ovalaire à proximité du pisiforme (flèche).
B: La radiographie de contrôle à 2 mois montre la disparition complète de la calcification (flèche), permettant de confirmer le diagnostic de dépôts
d’apatite.
Figure 4: Patient de 65 ans ayant un antécédent de chondrosarcome
du 2
e
orteil du pied droit ayant bénéficié d’une amputation il y a 10 ans.
Tuméfaction indolore de la base du pouce. La radiographie standard,
centrée sur la base du pouce, montre des nodules ostéochondromateux
secondaires (tête de flèche) dans un contexte d’arthrose trapézo-
métacarpienne (flèche).
A
B
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LA CALCINOSE PSEUDOTUMORALE
La calcinose pseudotumorale correspond à des dépôts
d’amas calciques (dépôts d’hydroxyapatite) dans les
parties molles péri-articulaires survenant volontiers chez
les patients souffrant d’insuffisance rénale chronique
non traitée. Ces amas sont souvent volumineux chez les
patients hémodialysés et chez les patients transplantés (3).
On les retrouve essentiellement au niveau des grosses
articulations (hanches, épaules, genoux et coudes). Ils
peuvent siéger de façon moins fréquente aux extrémités.
Les radiographies retrouvent alors des calcifications
denses présentant des contours plurilobulés (Figure 2).
Ces dépôts d’hydroxyapatite de calcium sont bien indivi-
dualisés en TDM avec, pour les plus volumineux, mise en
évidence de niveaux de sédimentation.
LA CHONDROCALCINOSE PSEUDOTUMORALE
La chondrocalcinose pseudotumorale correspond à la
présence de dépôts de cristaux de pyrophosphate de
calcium sous la forme d’une masse solitaire calcifiée de
contours mal limités pouvant mimer un tophus goutteux
ou une pathologie tumorale (Figure 3) (4-6). Ces dépôts
peuvent prendre la forme d’une pseudotumeur. Elle a été
décrite essentiellement au niveau des doigts, des pieds,
des coudes, de l’articulation acromio-claviculaire et de
la hanche.
L’OSTÉOCHONDROMATOSE SECONDAIRE
Pathologie secondaire à une chondropathie sous jacente.
A la différence des chondromatoses synoviale ou tenosyno-
viale, les nodules ostéochondromateux sont de taille et de
forme variable (Figure 4).
LA MALADIE À DÉPÔTS D’HYDROXYAPATITE
La maladie à dépôts d’hydroxyapatite est une affection
idiopathique (certains auteurs ont incriminé des micro-
traumatismes répétés) qui correspond à des dépôts d’hydroxy-
apatite de calcium péri-articulaires et articulaires (7).
Ces calcifications sont souvent asymptomatiques. Leur
traduction clinique (douleur intense s’installant en 48h)
correspond à la phase de résorption des calcifications et
donc à la guérison. L’exemple le plus typique est celui
de la tendinopathie calcifiante de l’épaule. En radio-
graphie, les calcifications sont denses, amorphes, arron-
dies ou ovalaires. Elles siègent à l’insertion des tendons
mais peuvent également se situer au niveau de la capsule
articulaire, dans les gaines tendineuses, les bourses
séreuses ou même dans l’os. Au niveau de la main, les calci-
fications siègent fréquemment sur le tendon du fléchisseur
ulnaire du carpe ou à proximité de son insertion sur le
pisiforme (Figure 5).
CONCLUSION
Les lésions calcifiées de la main sont le principal diagnostic
différentiel des tumeurs cartilagineuses des extrémités.
Elles sont fréquemment observées sur des radiographies.
Leur découverte sera volontiers fortuite ou se fera à l’oc-
casion d’une mise au point d’une tuméfaction ou d’une
douleur rapidement intense. Ces lésions calcifiées peuvent
prendre l’aspect de pseudotumeurs et sont presque tou-
jours des pathologies bénignes.
Références
1. Larbi A, Viala P, Omoumi P, et al. Cartilaginous tumours and calcified lesions of the hand:
a pictorial review. Diagn Interv Imaging 2013;94:395-409.
2. Harrold L. New developments in gout. Curr Opin Rheumatol 2013;25:304-9.
3. Remy-Leroux V, Reguiai Z, Labrousse AL, et al. [Tumoral calcinosis at an unusual site in a
haemodialysis patient]. Ann Dermatol Venereol 2009;136:350-4.
4. Nguyen C, Bazin D, Daudon M, et al. Revisiting spatial distribution and biochemical
composition of calcium-containing crystals in human osteoarthritic articular cartilage.
Arthritis Res Ther 2013;15:R103.
5. Luisiri P, Blair J, Ellman MH. Calcium pyrophosphate dihydrate deposition disease
presenting as tumoral calcinosis (periarticular pseudogout). J Rheumatol 1996;23:1647-
50.
6. Reginato AJ, Tamesis E, Netter P. Familial and clinical aspects of calcium pyrophosphate
deposition disease. Curr Rheumatol Rep 1999;1:112-20.
7. Steinbach LS. Calcium pyrophosphate dihydrate and calcium hydroxyapatite crystal
deposition diseases: imaging perspectives. Radiol Clin North Am 2004;42:185-205,vii.
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